Paye ton Pinard

En tant que femme dans le monde du vin, avez-vous déjà participé à un événement dans lequel vous vous sentiez pleinement sereine ? Bienvenue au premier salon de Paye ton pinard où soufflait tout le week-end un vent de sororité, partage et bienveillance.

La parole des victimes enfin libérée

Les comportements sexistes dans le monde du vin, un (malheureusement) très large sujet. Et Isabelle Perraud, vigneronne engagée dans le Beaujolais, ne le connaît que trop. « Ouvertement militante féministe et contre les violences sexistes et sexuelles, j’avais des retours sur les salons de femmes qui venaient me confier leurs histoires », il n’en fallait pas plus pour qu’elle décide de créer un compte Instagram afin de relayer ces récits. C’est la naissance de Paye ton Pinard. Très vite, les confessions affluent. Enfin une plateforme sur laquelle nous nous sentons en sécurité et libres de parler. La communauté grandit et on parle de #Metoo du vin. Un mouvement dont le secteur avait bien besoin.

Car ce qui pèse souvent sur les victimes, c’est ce sentiment de solitude. Ce silence pesant lorsqu’elles osent évoquer leur agression, et qui les pousse finalement à minimiser l’acte abject qu’elles ont subi. Nous avons toutes, à différents niveaux, expérimenté cette sensation si injuste. Cet instant où l’on se remet en question au lieu de pointer du doigt son bourreau. Certaines en viennent même à quitter leur entreprise, voire le monde du vin, épuisées par cette omerta.

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Témoignages d’un secteur qui doit changer, entre violences et sexisme ordinaire

Dimanche 6 avril 2025, 13 heures. Le salon On lève son verre et on se casse, organisé par l’association Paye ton Pinard, accueille une table ronde « Être une femme dans le monde du vin ». Quatre profils distincts mais une expérience commune qu’elles nous transmettent. Par exemple, cette équation presque insolvable lorsqu’elles s’occupent de clients au domaine « Je dois être bien habillée, mais pas trop pour qu’ils ne pensent pas que ce soit pour eux, sourire mais pas trop sinon ils croient qu’ils ont une touche, mais rester aimable quand même sinon on me dit que je suis une porte de prison ». Ou cette pression de se fondre dans un milieu aux codes masculins plutôt que d’assumer ce que nous sommes. Et celles qui ont connu le pire et se retrouvent sans rien.

C’est le cas d’une vigneronne ayant eu le courage de quitter son conjoint suite à des violences conjugales, mais qui se retrouve liée à lui par un Groupement Agricole d’Exploitation en Commun. Les violences sont reconnues pénalement mais le GAEC, lui, perdure. Par surcroît, l’obligation de travail exclusif au sein de la société pour les associés l’empêche de trouver un emploi. Un scénario ubuesque où l’administration française plonge une victime dans une situation de précarité alors que l’agresseur profite des fruits de son dur labeur.

Une salariée dans un syndicat viticole a essuyé des VSS (violences sexistes et sexuelles) à répétition, se voyant rabaissée au quotidien, sans qu’aucun des témoins de ces agissements ne lui vienne en aide. Avant cela, elle a travaillé dans l’industrie pharmaceutique, et jamais elle n’avait vécu de tels comportements. Elle le dit, en plus d’enjeux sociétaux, c’est le monde du vin qui est problématique. Elle a d’ailleurs décidé d’en partir définitivement.

Un salon militant pour un changement durable

Mais alors, comment faire bouger les choses ? Par des actions de sensibilisation et de prévention. Et c’est là toute la mission de Paye ton Pinard. En plus des témoignages, l’association pense des supports à destination des structures viticoles. Désormais « on est financés par le Ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes et au niveau européen sur le projet Daphné » nous dit Isabelle Perraud. Avec une quinzaine d’autres associations et collectifs, elles ont pour objectif de mettre en place des outils pour lutter contre les VSS sur trois ans. Cela passera notamment par des interventions dans diverses structures telles que des caves coopératives, des institutions, des écoles et des propriétés viticoles majeures. Pour que le monde du vin devienne enfin inclusif et sécurisant.

Cet état de quiétude tant recherché, nous l’avons atteint les 5 et 6 avril, tout au long de l’événement. « C’est vraiment un salon militant, toutes les femmes savent pourquoi elles sont là », continue Isabelle Perraud. Je suis rédactrice dans le vin depuis dix ans et jamais je ne m’étais sentie aussi à l’aise dans ce type de manifestation. Les conversations et les dégustations vont bon train, je découvre des personnalités incroyables, des quilles aussi étonnantes que superbes, et tout cela sans une once d’ambiguïté, de gêne, de questionnement sur les vraies intentions de la personne en face. Un détail ? Certainement pas. Après des années à redouter une main mal placée ou un commentaire humiliant, quel plaisir incommensurable de passer de stand en stand et rencontrer des personnes ayant les mêmes valeurs.

Alors on lève son verre, on se casse mais on n’oublie surtout pas de remercier l’association Paye ton Pinard. Merci de nous écouter, nous croire, nous fédérer, nous soutenir, nous donner la force de parler.

 

Si vous voulez soutenir l’association, rendez-vous sur HelloAsso.

Marie

Entre écriture et épicurisme, qui a dit qu’il fallait choisir ? Certainement pas moi ! J’ai donc exploré toutes mes passions au fil des années. La fac de droit pour les lettres d’abord. Puis l’école hôtelière pour la gastronomie. Et là, la révélation ! Je découvre le monde du vin et plonge tête première dans cet univers captivant. Au revoir les cuisines, bonjour la sommellerie et, pour parfaire tout ça, un master spé en vins et spiritueux.

Côté pro aussi, on sent une personnalité touche à tout. Je suis freelance dans les vins et spiritueux depuis 10 ans, le terrain de jeu idéal pour un esprit éclectique. Résultat d’une nature curieuse qui n’arrête jamais d’apprendre, j'ai appris à maîtriser en profondeur tout ce qui me fascine, est-ce qu’il ne serait pas temps de vous partager tout ça ?

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